Racontez nous sa vieTwinkle Twinkle little star
how I wonder what you are
Up above the world so high
Like a diamond in the sky
Je la regardais avec des yeux brillants puis je me laissais aller à ses douces paroles. Je n'avais jamais entendu le reste de la chanson, je m'endormais toujours après ces quelques vers. Lorsque j'étais triste ou en colère, maman n'avait qu'à me chanter cela et tout redevenait calme et paisible. C'était magique. Je l'aimais.
Je n'ai jamais connu mon père, maman ne m'en a jamais parlé. Pendant près de six ans nous avons vécu toutes les deux seules, heureuses. Nous n'avions pas beaucoup d'argent, je le voyais bien. Nous vivions dans un petit appartement dans un quartier malfamés, je n'avais pas ma propre chambre mais je m'en fichais ; je dormais avec maman. Il y avait en tout deux pièce, cette chambre donc ainsi qu'un autre, plus grande, qui comprenait un petit salon, une salle à manger ainsi que la cuisine. Tout paraissait grand dans cet appartement, moi-même je me sentais grande.
Il arrivait des fois où maman pleurait dans la chambre, je trouvais ça normal moi après tout il m'arrivait bien de pleurer à moi aussi. Lors de ces moments, je me blottissais dans ses bras et je lui chantais la chanson, alors elle se calmait et me caressait les cheveux. Ma mère et moi, c'était une relation plus que fusionnel, on ne pouvait pas vivre l'une sans l'autre. Elle était mon monde, j'étais le sien ; je ne connaissais qu'elle.
Nous n'étions pas tout le temps que toutes les deux, il arrivait des moments où des hommes venaient chez nous, plus précisément dans la chambre de maman. Quand ils avaient.. finis j'apercevais un pansement sur le cou de maman, je ne me posais pas trop de questions, je en voulais pas voir un point négatif chez elle.
Lorsque j'eus six ans, elle décida de m'inscrire à l'école. C'était agréable, je me suis faites beaucoup d'amies, j'avais enfin une sociale. Mon monde ne tournait alors plus autour de maman et je commençais à m'éloigner d'elle, à la repousser. Un jour alors qu'elle m'accompagner à l'école comme habituellement, elle me dit avec un sanglot dans la voix « Si tu veux un rester un peu plus longtemps avec tes copines ce soir, vas-y. ». Elle n'eut pas à me le dire deux fois et le soir même je profitais au maximum de ces prétendues amies que je n'ai plus revus depuis longtemps. Je rentrais vers sept heure du soir sur la pointe des pieds, je ne voulais pas réveiller maman si elle faisait une sieste. Je m'installais tranquillement sur notre petit canapé puis j'attendais. Je ne sais pas vraiment quoi, maman je suppose. Au bout de quelques minutes d'un silence lourd et pesant, un bruit vint briser cette ambiance. Mon instinct me criait de me cacher et j'avais décidé de l'écouter, je m'étais donc caché sous la table, la nappe me recouvrait mais, en m'allongeant, je pouvais voir en dessous. Ma mère s'approcha avec un homme, il était grand, très grand, à tel point que je ne pouvais voir son visage. Elle criait mais je ne comprenais pas ce qu'elle disait, mes oreilles sifflaient ; j'avais peur. Il la poussa sur le canapé et il se pencha vers elle pour lui chuchoter quelque chose que je ne pus entendre, elle lui répondit d'un air dégoûté et, en réponse, il prit le couteau pliable qui dépassait de sa poche arrière et porta la lame à son cou. Elle ne bougeait plus et il la fit s'allonger. Il rangea son arme et la déshabilla. Il avait l'air de se délecter de ce spectacle, il observa maman pleurer plusieurs secondes puis il se déshabilla à son tour ; je fermais les yeux alors. Et elle cria, fort, longtemps. C'était insupportable. Il ne fit rien pour la faire taire et il continua à faire grincer le canapé, cela faisait tellement de bruit que j'eus peur que le canapé cède. Au bout de très longues minute, il poussa un petit cri et s'ensuivit un profond silence. Je rouvrais les yeux, Maman s'était relevé et lui il se rhabillait, je vis ses lèvres bouger mais je ne pus entendre ce qu'elle disait. Le visage de l'homme se décomposa : « Tu en as trop dit cette fois ». Il prit une poignée de ses cheveux et la jeta à terre, juste devant la table. Elle tourna la tête vers moi et resta figé puis, lorsqu'elle me sourit enfin, il lui trancha la gorge. Par réflexe, j'avais mis ma main devant ma bouche afin de m'empêcher de crier mais je n'en avais pas vraiment besoin ; j'étais totalement paralysée. Il déplaça lentement son corps de sorte qu'elle fut un peu plus éloigné de moi puis il s'en alla. Sans réfléchir, je sortais de ma cachette afin d'aller au chevet de maman. Elle avait toujours un sourire doux sur les lèvres. Les yeux embuées, je chantais vainement sa chanson. Elle ne bougeait pas, plus. J'entendais des pas se rapprochaient mais je ne réagissais pas, j'appris alors le deuxième couplet :
« Twinkle, twinkle little star
How I wonder what you are
When the blazing sun is gone
When he nothing shines upon,
Then you show your little light,
Twinkle, twinkle little star »
La même chanson, la même mélodie mais une voix différente. Une voix d'homme, une voix rauque, une voix douce et calme alors même qu'il venait de tuer une femme. La chanson ne sonnait pas pareil dans sa bouche. Je m'évanouis alors.
Lorsque je rouvris les yeux, j'étais dans un coin de la pièce. L'homme était assis à côté d'un sac poubelle, il semblait épuisé. Il prononça un « pfiou » haut et distinctif puis se leva enfin pour porter le sac. Je ne sais pas si il l'a fait exprès ou si il n'avait tout simplement plus de force mais le sac tomba et son contenu se répandit sur le sol. Je savais maintenant ce qu'il y avait à l'intérieur. Je me souviens de chaque détails, chaque « morceau », chaque goutte de sang : tout.
C'est dingue cette façon qu'on a de ne retenir que le pire.
Il ramassa tout sans ménagement, comme si ce n'était rien d'autre que de vulgaires ordures tombés par terre. Soudain, son regard croisa le mien. Il s'approcha de moi, son couteau sanguinolent dans la main et me mit ce dernier sous la gorge. Je l'observais avec un regard de petit animal effrayé, des larmes coulaient sur ma joue et je fermais les yeux. Je remarquais alors que le couteau n'était plus sous ma gorge puis, quand la porte d'entrée claqua, je rouvrais les yeux : il était partit.
Je ne sais pas pourquoi il m'a épargné, après tout j'étais un témoin. J'avais vu son visage, son corps, la scène, j'avais tout vu ! Peut-être que dans sa tête d'abruti psychopathe il a eu assez de pitié pour ne pas tuer une gamine de six ans.
Puis j'ai attendu, j'attendais que quelqu'un est enfin l'esprit de venir voir ce qui s'est passé dans un HLM où une femme avait été entendu crier violemment après quelqu'un. J'attendais que quelqu'un se dise qu'il y avait une mère et son enfant et qu'elle pouvait être en danger. Au bout de quelques heures, ils sont enfin venu. Ils ont défoncé notre porte puis ils sont rentrés. L'homme n'avait pas nettoyé alors ils ont vu tout ce sang par terre et moi qui y baignée presque. L'un d'eux m'a porté et j'ai fermé les yeux.
Je les ai rouvert alors que j'étais à l'hôpital. Je portais ma main à mon cou et remarquais un bandage, alors que j'écarquillais les yeux l'infirmière tenta de me rassurer : « Ce n'est rien, tu auras sûrement une petite cicatrice mais elle partira avec le temps ». Elle mentait, presque vingt ans après elle est toujours la et toujours visible. Je lui avais alors fit un petit sourire timide.
Le temps passait rapidement, je passais mes journées à dormir. Des policiers étaient venu m'interroger mais je n'avais rien dis. En réalité, depuis qu'il m'avait récupéré je ne parlais pas. Je n'y arrivais pas. Devant mon incapacité à leur répondre oralement, l'un d'eux m'avait donné un carnet et un stylo. Depuis, c'est mon mode d'interaction social. Ils parlent, j'écris.
Après ma sortie de l'hôpital, je suis resté quelques mois dans un orphelinat. J'étais seule mais j'aimais peindre, dessiner. Un jour vint une femme. Je ne la connaissais pas mais elle semblait me connaître car, quelques mois après sa venu, elle m'avait adopté. Ca avait été rapide mais je m'en fichais. Elle m'emmena chez elle et, en même temps que son nom, j'adoptais sa famille. Deux garçons, un brun et un blond, l'un plus grand et l'autre plus petit que moi. Leur père était mort il y a peu, voilà un point que l'on avait en commun : nous avions tous trois perdu un de nos parents sauf qu'eux avaient leur mère, moi j'ignorais qui était mon propre père. Peu après mon dixième anniversaire, elle m'expliqua tout ce que je devais savoir sur « notre » monde : moroï, dhampire, strigoï. Natascha m'expliqua également que j'étais une dhampire, que mon devoir était de protéger les moroï et que, pour apprendre cela, il fallait que j'aille dans une académie. J'ignore toujours comment elle a su que j'en étais une, je ne lui ai jamais posé la question.
Au fil des années, la relation avec ma nouvelle mère se dégradait. Elle avait comme du dégoût pour moi, elle me traitait différemment de ses deux fils. Je trouvais alors du réconfort auprès de Logan, le fils de notre femme de ménage, c'était lui aussi un dhampir. Il jouait avec moi, me protégeait quand il pouvait. Erik aussi était gentil avec moi, il me protégeait encore plus que Logan, il me réconfortait quand il voyait que je n'étais pas bien et, surtout, il ne me jugeait pas. Lawrence aussi était gentil, mais je n'étais pas aussi proche de lui que de Erik et Logan.
Un jour, alors que j'avais demandé à ma mère des informations sur mes parents, elle me dit :
« Ton père était un moroï infidèle et ta mère une catin rouge »
Je l'avais alors foudroyé du regard. Je savais ce que signifiait ces deux termes, je me fichais de celui sur mon père mais je ne supportais pas qu'elle traite maman de cette façon. Tranquillement, je prenais un bout de papier, un stylo et j'écrivais simplement « fuck you », tout sourire, je lui montrais mon chef d'oeuvre puis je m'en allais. Un an après, elle m'envoyait étudier à St Vladimir : « c'est la meilleure école pour tes études ! ». Je pense surtout qu'elle ne supportait plus de me voir, j'ignore toujours pourquoi.